La Bible, une histoire qui n’en finit pas

La Bible est un livre ouvert dont nous ne sommes pas d’éternels commentateurs, mais des lecteurs qui l’interprètent pour leur propre vie.

Commentaires des photos :

On a l’habitude de dire que dans chaque épreuve, il y a une opportunité. Durant celle que nous traversons et lors du premier confinement, la « Bible des confinés », une Bible partagée unique est apparue ! En effet, l’Alliance biblique française faisant appel à plus de 500 bonnes volontés de tout âge et de toute confession chrétienne ont reproduit à la main un Psaume, un chapitre d’un Évangile ou encore un chapitre des Actes et des Lettres des Apôtres. Chaque copiste avec son style, sa personnalité, sa créativité a produit une œuvre originale et il se dégage de par la variété des styles d’écriture, des couleurs, des expressions artistiques bien diverses, une émotion invitant le lecteur à entrer dans la lecture « visuelle » du livre. De plus, ce travail collectif a créé du lien pour transmettre un message et se connecter à l’essentiel. Cette Bible manuscrite fut ainsi une véritable entreprise collective de transmission de la Bible. (Photos tirées de la Bible manuscrite – Éditions Biblio)

Tu me racontes des histoires ! » dit la maman, un peu énervée, à son enfant qui semble tout inventer ! Certains auraient envie de s’exclamer semblablement à propos de la Bible. En effet, elle est pleine d’histoires, ce qui fait d’ailleurs son charme. Chaque jour, à l’école primaire, on m’en lisait quelques-unes. Je vois encore Daniel dans la fosse aux Lions. Le combat de David et Goliath reste célèbre ! Et les aventures de Moïse ont inspiré bien des cinéastes.

La Bible nous raconte non seulement des histoires – toutes ne sont pas historiques pour autant -, mais une histoire, celle de la relation de Dieu avec les hommes. Elle ne se passe pas sur les sommets de l’Olympe, mais au cœur même des siècles qui s’additionnent, là où l’humanité écrit sa propre histoire. Il y a donc comme une histoire dans l’histoire, une histoire sainte. Dieu se donne à rencontrer non pas dans des rites ou des dogmes, mais dans le déroulé de nos jours. « Dieu s’est révélé comme histoire », dit le pape François.

Contemporains de la Révélation

Ce Livre n’a pas été écrit d’une seule traite, comme dicté d’en haut, mais au long de l’histoire d’un peuple, puis des communautés chrétiennes, par de véritables auteurs, selon différents genres littéraires. Une bibliothèque s’est ainsi constituée sur environ mille ans. Au fil du temps, la vision des choses a évolué, s’est corrigée et enrichie. Prenons un exemple. La mentalité religieuse primitive peinait à concevoir que des événements se passent sans l’assentiment de Dieu, le Tout-Puissant. C’est donc lui qui, dans le livre de Samuel, suggérait à David une désobéissance et le punissait ensuite. Le livre des Chroniques raconte le même fait des siècles plus tard, mais en attribue la responsabilité à Satan (Voir 2 Samuel 24 et 1 Chroniques 21). La théologie a évolué.

Rédigée en hébreu, puis en grec, cette Bible a fait l’objet de multiples traductions. Celles-ci ont souvent été remises sur le métier (il y a actuellement une vingtaine de traductions différentes en français). C’est encore une autre histoire ! Est-ce tout ? Que nenni ! Encore faut-il que ces pages soient non seulement commentées, mais interprétées selon l’époque où elles sont lues. Comprend-on aujourd’hui les textes de la Création de la même façon qu’avant la théorie de l’évolution ? Déjà au VIe siècle, le pape Grégoire le Grand enseignait que l’Écriture progresse avec ceux qui la lisent. Les Éditions Salvator viennent en ce sens d’en publier une nouvelle édition assortie de centaines de notes. La Bible est donc un livre ouvert. L’activité du croyant fait partie intégrante de la Révélation. Ainsi devenons-nous contemporains de la Révélation. «  Le jour où on découvre le sens d’une parole d’Évangile, c’est pour nous le jour où elle est dite. » (Jean Grosjean)

Dieu se révèle en accompagnant l’humanité dans sa marche. La Bible ne nous présente pas des vérités intemporelles, communiquées une fois pour toutes, mais rapporte des expériences que l’on peut faire de Dieu au cœur même d’une histoire toujours ambiguë et parfois même glauque. Que l’on pense aux pages violentes de l’Ancien Testament. Dans le Nouveau Testament, ce sont quatre expériences différentes de Jésus qui nous sont rapportées, celles de quatre témoins et de leur communauté. Et, heureusement, il y a des différences entre les quatre récits, sinon cela serait suspect !

Nous ne sommes donc pas d’éternels commentateurs, mais des lecteurs qui interprètent pour leur propre vie. À l’histoire biblique s’ajoute une histoire de la rédaction et de l’interprétation. Ce vieux livre nous fait rencontrer des témoins et peut ainsi féconder notre propre rencontre de Dieu, au cœur même de notre histoire personnelle, dans le monde qui est le nôtre. « Un mot est mort quand il est dit, disent certains, constatait la poétesse américaine Emily Dickinson (1830-1886). Moi je dis qu’il commence à vivre ce jour-là. »

Une chronique de Charles Delhez parue dans la Libre

Charles Delhez est l’auteur de ‘Apprendre à lire la Bible’, avec Jean Radermakers sj., Éditions Fidélité, 2007 (3e édition 2016).

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