Le christianisme est un humanisme

Après les dieux, Dieu avait pris une majuscule, puis ce fut l’Homme, maintenant, c’est la Nature.

« L’originalité du christianisme est d’être un humanisme, même s’il n’est pas le seul, pas plus qu’il n’est le seul monothéisme ou la seule spiritualité. » Photo : capture d’écran, journal Dimanche

L’humanisme recule face au naturalisme. On reproche à l’homme son spécisme (Idéologie qui postule une hiérarchie entre les espèces, spécialement la supériorité de l’être humain sur les animaux) : pourquoi donc se met-il à part du monde animal, se voulant toujours supérieur ? Il est un vivant parmi les autres. Sans plus. D’un autre côté, on le mesure à la machine : pourquoi se réserve-t-il le monopole de la conscience ? La machine ne serait-.elle pas aussi intelligente que lui ?

L’originalité du christianisme, cependant, est d’être un humanisme, même s’il n’est pas le seul, pas plus qu’il n’est le seul monothéisme ou la seule spiritualité. Selon la tradition judéo-chrétienne, l’homme est le dessein même de Dieu. Il a été créé le 6e jour, à l’image et à la ressemblance de son créateur, dit le premier récit de la création, avec pour tâche de soumettre la terre et, précise le second récit, de cultiver le jardin.

L’homme est au centre et tout le reste est ordonné à lui qui lui-même est tourné vers Dieu. Mais de nos jours, on ne sait plus si Dieu existe et si l’homme a une place particulière et décisive. Il nous reste la Nature. Serait-ce une conséquence de la révolution scientifique des XVIe – XVIIe siècles ?

Un peu moindre qu’un dieu

Le Psaume 8 est assez éloquent : « A voir ton ciel, ouvrage de tes doigts, la lune et les étoiles que tu fixas, qu’est-ce que l’homme pour que tu penses à lui, le fils d’un homme, que tu en prennes souci ? Tu l’as voulu un peu moindre qu’un dieu, le couronnant de gloire et d’honneur ; tu l’établis sur les œuvres de tes mains, tu mets toute chose à ses pieds. » Mais ne nous prendrions-nous pas pour des dieux, sans personne au-dessus de nous ?

On connaît l’histoire de cette injonction « soumettez-la« . Nous l’avons lue avec des lunettes industrielles, allant jusqu’à exploiter notre planète de manière éhontée, oubliant que nous n’en étions que les gérants et les cultivateurs. Aujourd’hui, avec nos lunettes devenues écologiques, nous nous en faisons le reproche et nions même notre spécificité. D’aucuns considèrent la nature comme plus importante que l’homme, oubliant qu’elle-même est un cycle de vie et de mort.

Quand ces textes bibliques ont été écrits, l’animal humain était encore bien fragile, se sentant petit face à la puissance de la nature. Il s’agissait de vaincre ces forces de mort et non d’exploiter, il fallait gérer et cultiver, non pas détruire. Mais celui qui craignait d’être détruit est devenu, au fil des siècles, le destructeur et s’est cru maître et possesseur de la nature. Celle-ci, hélas, prend sa revanche. Ou plutôt, elle pleure avec nous. « En me sauvant, vous vous sauverez aussi« , nous dit-elle. Notre attitude est en effet tout autant meurtrière que suicidaire.

L’homme est créé pour…

Ce débat philosophique est complexe (comme toujours en philosophie) et loin d’être achevé. En attendant, je me situerai au niveau spirituel. Dans ses Exercices spirituels, saint Ignace de Loyola débute par une méditation appelée Principe et Fondement. Le premier mot est « L’homme ». Nous sommes en effet à la Renaissance, cette période où petit à petit on se détourne du ciel pour regarder vers la terre. « L’homme est créé pour louer, respecter et servir Dieu notre Seigneur, et par là sauver son âme. Les autres choses sur la face de la terre sont créées pour l’homme, pour l’aider à poursuivre la fin pour laquelle il est créé. »

« L’homme n’est ni ange ni bête », disait Pascal. Ni ange, en effet, car nous sommes bien incarnés, tandis que l’Intelligence Artificielle n’est ni de chair ni d’os, mais un « pur esprit », de simples algorithmes. Ni bête, car tout en étant du monde des vivants, nous en avons la responsabilité. Je continue à croire que l’homme a une mission spécifique, et que là est sa spécificité : faire réussir l’univers, accompagner l’évolution, mener le cosmos vers la communion universelle entre tous les vivants. Communion, s’il est un terme humain, c’est bien celui-là.

Charles DELHEZ s.j. dans le journal Dimanche N° 27 – 9 août 2020 – LES MOTS POUR LE DIRE

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