La parabole du semeur, de dimanche dernier (Matthieu 13, 1 – 23), nous est bien connue. Belle homélie provenant d’un moine d’Orval.

Quand nous aimons quelqu’un, non seulement nous désirons le lui dire, mais nous aspirons aussi à nous dire, à nous communiquer. Si Dieu nous aime, il veut entrer en communication avec nous. Par sa Parole, c’est ce qu’Il fait : il se fait connaître, il nous confie quelque chose de lui.
Jésus compare cette démarche de son Père au geste du semeur qui confie ses grains à la terre. Dieu nous fait confiance. En se communiquant, il nous confie quelque chose de lui ; nous en devenons responsables. Nous pouvons laisser tourner à rien, ou nous pouvons laisser grandir en nous ce que Dieu nous donne de lui. Jésus élabore cette double possibilité très concrètement, en sorte que chacun de nous puisse se sentir concerné à chaque niveau de la parabole.
Dimanche passé à l’Eucharistie, nous avons entendu la parole de Dieu. Aujourd’hui, faisons le bilan : qu’est-ce que cette parole a changé dans notre vie ? Peut-être pas grand-chose pour ne pas dire rien du tout. Ces grains qui n’ont pas pris racine ou que les oiseaux ont mangés aussitôt, c’est pourtant bien en nous qu’ils étaient semés. Mais nous avions sans doute la tête et le cœur ailleurs …
Et que penser du grain qui pousse vigoureusement, mais qui ensuite se dessèche faute de racines ? L’amour est une plante délicate. A ses débuts, pas de problèmes : elle pousse vigoureusement, portée par les sentiments, par la nouveauté de la découverte et le charme de l’aspect extérieur des choses. Toutefois, pour durer, la relation doit s’approfondir, faire pousser des racines dans le quotidien, passer du premier sentiment à la fidélité.
La relation avec Dieu ne fait pas exception à cette règle. D’autant plus que nous vivons dans un monde où les média contredisent sans cesse la Parole de Dieu, mettent en question la fidélité en amour, en ne mettant guère en valeur le respect d’autrui et la non-violence. Si nous ne creusons pas notre foi, si nous ne prenons pas du temps pour prier, pour approfondir notre relation avec Dieu, comment tenir comme chrétiens dans un monde néo-païen ? Sans racines en Dieu, pas possible.
Ce n’est pas tout. Même chez le chrétien soucieux d’approfondissement, il y a encore le problème des ronces qui risquent d’étouffer le bon grain. Les soucis pour le standing de vie que l’on se doit, autant que les obligations professionnelles qui s’accumulent, peuvent devenir si envahissants, qu’ils finissent par étouffer la vie spirituelle. Et pourtant, la réussite professionnelle ne dédommage jamais de l’échec dans le couple ou l’évanescence de Dieu. A chacun de voir où il peut mettre la faux dans les ronces pour les couper suffisamment afin que puisse respirer la relation vitale avec Dieu et avec les proches.
Pessimiste, cette parabole ? Ce serait oublier la certitude tranquille du Semeur divin qui nous fait confiance. Nous pouvons porter du fruit ; il nous suffit d’être réalistes. Sortir de la messe en se disant qu’on va vivre en parfait chrétien en faisant le bien à tout le monde, c’est à coup sûr se retrouver dimanche prochain encore avec un bilan négatif, à cause d’un propos trop vague et par surcroît peu réaliste. Pour mettre en pratique la Parole de Dieu entendue aujourd’hui, il suffit de se fixer un petit point précis, par exemple : le matin au lever, je prendrai dix minutes de prière, ou dix minutes de lecture d’évangile ; ou encore : avant de me mettre au lit, je remercierai le Seigneur pour toutes les belles choses qu’il m’a données aujourd’hui. Celui qui, pour avancer, veut aller à la fois dans tous les sens, s’éparpillera sans beaucoup avancer. Par contre, la petite goutte d’eau qui tombe toujours au même endroit réussit à marquer la pierre. En prenant résolument une seule et même direction, tout le reste devra nécessairement suivre.
De même la petite semence de la Parole de Dieu doit affermir ses racines en notre cœur, jour après jour, pour s’épanouir et porter du fruit dans les activités de notre vie.