Jeûne eucharistique : « La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la Pierre d’angle… » (Matthieu 21.42)

Je lis ça et là, sur les réseaux sociaux, des commentaires amers sur la décision de nos évêques de supprimer le culte public, sauf pour mariages, baptêmes et funérailles en petit comité. Il fallait s’y attendre.
Je comprends l’étonnement, voire le désarroi. Et puis, comme toute décision, elle est sujette à débat ou critique. Moi-même, je mentirais si je prétendais qu’elle ne m’a pas pris par surprise. Si cette mesure inédite prive nombre de fidèles de participer à l’Eucharistie, elle touche le prêtre que je suis dans son identité liturgique.
N’oublions cependant pas l’urgence sanitaire. Cette décision n’a pas été prise à la légère, ou de gaité de cœur par (comme je lis) un haut-clergé devenu fonctionnaire. Elle a été assumée par nos évêques (tout comme par le métropolite orthodoxe ou le responsable anglican), qui savaient que ce ne serait pas facile à comprendre et qu’ils seraient critiqués. (S’ils ne l’avaient pas prise, ils auraient aussi été critiqués).
Si je puis donc entendre de sincères plaintes, il me fatigue le ton de nombre de donneurs de leçons, qui savent toujours tellement mieux que tous les prélats du monde (sauf ceux qui pensent comme eux) ce qu’il faut faire pour sauver l’Église. Prenons garde de nous penser les infaillibles dépositaires de l’inspiration divine…
Ce matin, à l’occasion de ma dernière célébration en public pour quelques semaines, l’Évangile se voulait avertissement. « La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle… », lance le Christ. En ce temps de carême, quelle est donc notre Pierre d’angle? Une liturgie, si belle soit-elle? Un sacrement, source de Grâce? … Ou le Christ, lui-même?
En voyant ce jour mon agenda tout chamboulé par toutes ces annulations d’activités planifiées ou conférences préparées, je me suis senti renvoyé vers le silence et l’écoute. Vers le désert du carême. Vers un jeûne que je n’avais pas choisi, ni souhaité, mais qu’il m’était demandé d’accepter dans la paix.
Tel est le message que j’adresse à tous ceux qui vivent mal la décision de nos évêques. Demandez-vous : quelle est ma Pierre d’angle?
Extrait du blog de l’Abbé Eric de Beukelaer